Des milliers de soutiens du Nouveau front populaire sont réunis au soir du premier tour des élections législatives, Place de la République à Paris, le 30 juin pour lancer la campagne du second tour et contre l'extrême droite et le Rassemblement National. Crédit : Anton Karliner / Sipa / 2406302242

Le barrage contre l’extrême droite prend forme ce mardi 2 juillet avant le second tour des législatives, avec le désistement de plus de 210 candidats de gauche ou macronistes au profit de leurs rivaux, pour empêcher le Rassemblement national (RN) d’obtenir la majorité absolue dimanche 7 juillet.

Le dépôt des candidatures, clos officiellement à 16 heures -heure de Paris-, donne une vision éclaircie de la physionomie de ces élections, provoquées par la dissolution choc de l’Assemblée nationale le 9 juin par le président Emmanuel Macron.

Majoritairement de gauche (127) ou du camp macroniste (81), ces candidats sont pour la plupart arrivés troisièmes au premier tour dans une circonscription où le RN est arrivé en tête au premier tour.

Au total, avec les plus de 210 désistements recensés par l’AFP, une grosse centaine de triangulaires et quadrangulaires (trois ou quatre candidats qualifiés) subsiste, sur les 311 prévues dimanche dernier.

Ces retraits visent à empêcher le RN et ses alliés de former un gouvernement qui serait une première dans l’histoire française, l’extrême droite n’étant jamais été au pouvoir dans le pays en dehors de la Seconde guerre mondiale.

La plupart des projections en sièges réalisées ces derniers jours indiquent que le RN peinera à atteindre la majorité absolue de 289 députés. Les analystes privilégient le scénario de trois blocs à l’Assemblée (extrême droite, gauche, macronistes), ce qui pourrait rendre le pays ingouvernable alors qu’il s’apprête à accueillir les Jeux olympiques.

Mercredi 3 juillet, une émission spéciale permettra au Premier ministre Gabriel Attal (camp présidentiel), au président du RN Jordan Bardella et à la patronne des Écologistes Marine Tondelier (gauche) de s’exprimer à tour de rôle pendant chacun une heure.

Un président affaibli

Jordan Bardella promis au poste de Premier ministre en cas de majorité absolue RN, a dénoncé des « alliances du déshonneur » et appelé les électeurs à lui donner les clés du pouvoir « face à la menace existentielle pour la nation française » que représente selon lui la gauche.

La figure de proue de l’extrême droite Marine Le Pen a évoqué, elle, la possibilité de former un gouvernement avec une majorité relative de 270 députés, complétée avec des soutiens, « par exemple divers droite, divers gauche, quelques LR » (Les Républicains, droite).

Emmanuel Macron a affirmé pour sa part lundi à ses ministres que « pas une voix » ne devait aller au RN. Une manière de répondre à ceux qui, dans sa majorité et à l’instar du ministre de l’Économie Bruno Le Maire, renvoient dos à dos le RN et La France insoumise (LFI), parti de gauche radicale.

Mais la voix du président français, qui n’a pas pris la parole publiquement depuis une déclaration à Bruxelles jeudi et une lettre publiée dimanche, ne porte plus dans son propre camp.

Celui-ci lui reproche l’échec cinglant du premier tour et sa relégation en troisième position, loin derrière le RN et la gauche.

« Je suis chef de la majorité, c’est moi qui dirige cette campagne » et « l’important c’est ma parole », a rappelé le Premier ministre Gabriel Attal.

Le chef de l’État, attendu pour le sommet de l’Otan à Washington la semaine prochaine juste après le scrutin, est également affaibli sur la scène internationale, qui scrute avec attention ou inquiétude le résultat de dimanche.

Coalition ?

La journée de mardi a vu une passe d’armes entre Marine Le Pen et la présidence française.

Deux fois finaliste de la présidentielle face à Emmanuel Macron (2017 et 2022), Mme Le Pen a pointé un « coup d’État administratif » du camp présidentiel accusé de vouloir procéder à une vague de nominations avant une éventuelle cohabitation, notamment à la tête de la police et de la gendarmerie.

En réponse, l’Élysée l’a appelée à faire preuve de « sang froid » et de « mesure ».

Si le RN ne pouvait gouverner, les macronistes, une partie de la gauche et certains LR pourraient bâtir une « grande coalition », courante dans d’autres pays européens mais étrangère aux traditions politiques françaises.

Gabriel Attal a ainsi parlé d’une « Assemblée plurielle », le LR Xavier Bertrand évoquant de son côté un « gouvernement de sursaut national ».

La patronne des écologistes a admis qu’il faudrait « sûrement faire des choses que personne n’a jamais faites auparavant » en France.

Mais un représentant de la gauche radicale, Manuel Bompard, a exclu que LFI participe à une telle coalition. « Les Insoumis ne gouverneront que pour appliquer leur programme », a-t-il affirmé.

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