Le congrès des élus régionaux, départementaux, des parlementaires et des maires de Guadeloupe s’est tenu mercredi 12 juin au conseil départemental à Basse-Terre

Le congrès des élus de Guadeloupe s’est tenu mercredi 12 juin au conseil départemental à Basse-Terre. Dès huit heures et demie, la grande salle centrale où se tiennent les réunions importantes s’est remplie. Une soixantaine de conseillers régionaux et départementaux ont pris place au centre de la salle. Les ex-députés (depuis l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin) Max Mathiasin, Christian Baptiste et Olivier Serva se sont installés non loin. Les sénateurs Victorin Lurel, Dominique Théophile et Solanges Nadille également.

Un peu en retrait, journalistes photographes, cameramen, techniciens de radio et de télévision fonctionnaires territoriaux s’affairent, vont, viennent. Les travaux tardent à commencer. Ils débutent avec une bonne heure de retard.

Auparavant, Hubert Quiaba du « Collectif » venu dénoncer des « injustices » en a profité pour signaler entre autres que le conseil départemental avait acquis « dans le Nord Grande Terre des terres par usucapion de façon illégale ».

Après les discours du président du Congrès Guy Losbar, puis celui d’Ary Chalus président du conseil régional, les socialistes par la voix de Bernard Guillaume conseiller régional du groupe Péyi Gwadloup dénoncent « le refus de reporter les travaux d’un Congrès organisé en pleine crise politique nationale alors qu’il n’y a plus ni gouvernement, ni Parlement ». Il souligne aussi l’absence de consensus politique entre les présidents Losbar et Chalus.

Bernard Guillaume fustige des propositions de résolutions qui se « bornent à demander une fusion Région/Département dans l’identité législative, ce qui n’est pas à la hauteur des enjeux et qui ne permet pas d’obtenir un pouvoir normatif local ». Enfin et surtout il proteste contre « le refus de prendre en compte les propositions défendues par les groupes PS et Péyi Gwadloup ». Fort de ces récriminations le groupe Péyi gwadloup quitte le Congrès. Guy Losbar, répondant pendant la pause aux journalistes, qualifie la démarche du PS de posture politicienne.

Dans le champ de l’article 74 de la Constitution, sans jamais s’y référer explicitement

Les travaux reprennent leurs cours avec une série de prestations d’universitaires qui accompagnent les élus dans la préparation du Congrès. En fin d’après-midi, quatre résolutions sont soumises au vote. Elles sont adoptées à l’unanimité, sous les applaudissements de la salle.

Pour l’essentiel ces résolutions entérinent la proposition du Congrès de doter la Guadeloupe d’une collectivité unique disposant de « pouvoir normatif autonome local » c’est-à-dire législatifs et règlementaires, dans plusieurs domaines. Celui de l’aménagement du territoire pour notamment la gestion et l’accès au foncier, l’urbanisme et le droit du littoral, les ressources halieutiques, du sol et du sous-sol, la circulation routière et le transport routier, la desserte maritime d’intérêt territorial, la voirie, le droit domanial et des biens de la collectivité.

La première résolution entend conférer à la collectivité unique le pouvoir de décider en ce qui concerne le tourisme, les industries culturelles et créatives l’environnement, et l’énergie. La collectivité aurait compétence pour décider de la fiscalité locale, de l’éducation, de la recherche, et de la création d’établissements publics.

La deuxième résolution dans son article 1, liste les compétences qui seraient exclusives de l’État : justice, sécurité extérieure (protection et défense du territoire, armée), sécurité intérieure (maintien de l’ordre public et protection des personnes et des biens), la monnaie, l’état civil et la nationalité.

Un troisième bloc de compétences serait partagé entre l’État et la collectivité. Il s’agirait de la politique d’accès aux soins et à la prévention, l’éducation, l’élaboration des programmes scolaires, les filières de formation, la recherche, la coopération régionale, les relations avec le bassin caribéen, les ports et l’aéroport.

La troisième résolution décrit une assemblée territoriale de 60 membres « élus selon un mode de scrutin garantissant la représentation de l’ensemble des territoires de l’archipel notamment les îles du sud […] ».

L’assemblée délibérerait sur les affaires de la collectivité, exercerait le pouvoir normatif dans les domaines conférés par la loi, préparerait et voterait le budget. Le président serait élu par l’assemblée territoriale.

La troisième résolution prévoit également une « rationalisation de l’organisation intercommunale », après une concertation approfondie avec les communes et les établissements publics de coopération intercommunale, plus connus sous le nom de communautés d’agglomération.

Pendant les travaux préparatoires au Congrès, l’idée retenue était la suppression des communautés d’agglomération pour n’en garder que trois. L’une engloberait toute la Grande-Terre plus La Désirade, une autre la Basse-Terre plus Les Saintes, et la troisième serait la communauté des communes de Marie-Galante ainsi sauvegardée. Exit la Carl, le Nord Grande-Terre, le Sud Basse-Terre (Grand sud Caraïbe), le Nord Basse-Terre et Cap excellence.

Le texte adopté dans la résolution indique un fléchissement de la décision de garder trois entités. L’intervention de Julien Mérillon, chargé d’enseignement à l’université des Antilles retraités, lève un voile sur la solution qui pourrait être retenue dans ce volet de l’organisation intercommunale.

Dans cette nouvelle organisation administrative, Cap excellence serait maintenue. Julien Mérillon filant une métaphore, a suggéré qu’un papillon ne pourrait être défini que par ses ailes, entre celles-ci, se tient aussi un corps. Le corps du papillon dans la nouvelle organisation intercommunale serait Cap excellence. Pas sûr que cette présentation puisse convaincre les autres communautés d’agglomération et leurs élus qu’ils doivent disparaître alors que Cap excellence continue à exister.

Ary Chalus après avoir prononcé le matin un discours qui n’a pas permis de comprendre où il se situe par rapport à ce Congrès, a l’après-midi indiqué que ses réserves du matin avaient disparu. Les résolutions, signées par les deux présidents, devront être entérinées par un vote identique des deux assemblées dans les 15 jours.

Les quatre résolutions adoptées reflètent une volonté du Congrès de doter les élus locaux de compétences nouvelles. Celle de pouvoir légiférer dans des domaines spécifiques et celle de pouvoir partager des compétences avec l’État, et rompent avec le régime dit de l’identité législative consacrée dans l’article 73 de la Constitution.

Les mesures telles que la préférence locale pour l’emploi, la possibilité d’établir ses propres normes pour les ressources halieutiques du sol et du sous-sol entre autres, sont dans le champ du régime prévu par l’article 74 de la Constitution. Mais les résolutions ne s’y réfèrent jamais explicitement ni à aucun autre article de la Constitution d’ailleurs. Reste à savoir quelle sera la réponse du gouvernement à cette volonté de conférer des pouvoirs nouveaux aux élus du territoire. Ensuite il faudra passer un autre cap, le plus important : la réponse par un vote de la population à cette proposition, de faire entrer la Guadeloupe dans une nouvelle ère constitutionnelle.

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