Confrontée à un afflux toujours plus massif de visiteurs, la capitale catalane souhaite revoir son modèle touristique, source de tensions parmi les habitants.
Signe d’un malaise, les graffitis « Tourists go home » et les manifestations contre le surtourisme se sont multipliés ces derniers mois à Barcelone.
Avec 170 000 visiteurs par jour en moyenne, le tourisme représente 13,5 % du PIB de Barcelone, située dans le nord-est de l’Espagne. Mais il est aussi la troisième source de préoccupation pour le 1,6 million d’habitants que compte la capitale catalane, selon le dernier baromètre municipal. « À Barcelone […] il y a une dépendance économique excessive vis-à-vis du secteur touristique », estime Daniel Pardo, membre de l’Assemblée des quartiers pour la décroissance touristique. Pour lui, le tourisme a connu un développement « excessivement rapide et agressif » après la pandémie de Covid-19.
Signe d’un malaise, les graffitis « Tourists go home » et les manifestations contre le surtourisme se sont multipliés ces derniers mois à Barcelone. Ce dimanche 13 octobre, plusieurs milliers de personnes ont encore protesté contre l’organisation de la Coupe de l’America et le modèle économique de la ville. Cet été, des images montrant certains manifestants pointant des pistolets à eau sur des touristes avaient suscité de vives condamnations des autorités, qui redoutent de voir la tourismophobie évoluer en violences.
Procédure judiciaire
« La violence, c’est quand on est expulsé de son quartier » ou contraint de voir son environnement « disparaître peu à peu », estime pour sa part Daniel Pardo, qui juge « anecdotiques » ces images controversées. Les locataires d’un bâtiment situé près de la gare principale de Barcelone ont engagé une procédure judiciaire pour s’opposer à leur propriétaire, qui souhaite transformer ses 120 logements en appartements touristiques. Une trentaine de logements sont déjà affectés à cette activité et l’avenir des autres est en suspens.
« Nous avons eu des cas de touristes qui ont vomi d’un balcon à l’autre, des problèmes de bruit parce qu’ils organisent des fêtes, des odeurs de marijuana », énumère Pamela Battigambe, qui craint de devoir quitter la ville, où les loyers ont augmenté de 68 % en 10 ans. « Nous ne sommes pas contre le tourisme. Nous sommes contre cette forme de tourisme incontrôlé, ce n’est pas viable ».
Boutiques historiques remplacées
Souhaitant apaiser les esprits, le maire de Barcelone, le socialiste Jaume Collboni, a annoncé en juin son intention de mettre un terme à la location d’appartements touristiques d’ici fin 2028. La mesure pourrait toucher 10 000 logements. Mais l’association de propriétaires Apartur, indignée contre ce qu’elle considère être une « expropriation déguisée », a promis une série de recours. Elle réclame un milliard d’euros de dédommagement dans le cas où la mesure viendrait à être confirmée.
Près de la Sagrada Familia, la mercerie de Jordi Gimeno est l’une des rares boutiques historiques du quartier encore ouvertes. Les autres ont fermé car « des restaurants ou des boutiques de souvenirs les ont remplacés », décrit-il. À quelques mètres de là, Jolijn, une touriste venue des Pays-Bas, se dit compréhensive face aux critiques des Barcelonais. « À Amsterdam, nous avons le même problème : les gens n’ont plus la même vie qu’avant, lorsque le tourisme n’était pas si massif ». Pour Jordi Valls, adjoint au maire chargé du tourisme à la mairie de Barcelone le tourisme « génère de la valeur économique et de l’emploi. Au-delà de 13,5 % [du PIB] le tourisme n’apporte plus de valeur ajoutée et nous devons donc rechercher d’autres stratégies de gestion du tourisme, mais en même temps essayer de développer d’autres activités économiques qui permettent d’une manière ou d’une autre, de créer des emplois dans d’autres domaines. »
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