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Dans la période de l’entre-deux-guerres, Justin Archimède maire de Morne-à-l’Eau et boulanger est impliqué dans une affaire contre ses concurrents boulangers et ses adversaires politiques. Le conflit aboutit à sa révocation à la demande du gouverneur. L’affaire débute le 25 janvier 1924. Un client fait constater par les gendarmes de Morne-à-l’Eau que la boulangerie Archimède lui a vendu un pain de 430 g au lieu des 500 g que doit peser cette catégorie de pain. L’affaire est portée devant le tribunal. L’accusation est soutenue par les concurrents boulangers du maire. La farine coûte cher. Son coût n’est pas répercuté par la municipalité sur le prix du pain dont elle fixe le montant. D’où la fermeture d’entreprises. Pendant le procès la situation de premier magistrat du maire est mise en avant. Selon le tribunal, il « avait le devoir de s’attacher de tous ses efforts à protéger cette population contre les abus à l’occasion de la vente des denrées de toute première nécessité. (…) Le fait par lui de fausser le poids du pain que lui-même taxe, lui permettait d’user et d’abuser librement de sa situation… avoir seul en main le marché, l’exploiter à sa guise au détriment de ses administrés et de fabricants de pains ». Le chef d’entreprise Archimède est déclaré coupable du délit de tromperie et condamné à la peine de deux cents francs d’amende. Jugement confirmé en appel. La peine est assortie d’un sursis eu égard à la bonne réputation de l’intéressé. L’affaire va rebondir au niveau politique. Attaqué par ses concurrents, Archimède, ami d’Achille René-Boisneuf, est ciblé par ses adversaires dont Gratien Candace, parlementaire depuis 1911, acharné à la perte de Boisneuf. Homme puissant, dont le gouverneur Jocelyn Robert a été le secrétaire, Candace pèse de tout son poids dans cette affaire. L’interpellation d’Archimède par Robert est la marque de son influence. Sans surprise, le Conseil privé dans sa séance du 4 août 1924, prononce la suspension du maire Archimède de ses fonctions pour une durée de trois mois, car il paraissait « difficile d’admettre qu’un maire qui s’est rendu coupable d’une infraction de cette nature et dont l’autorité et la dignité morale se trouvent, du fait de la condamnation qu’il a encourue, singulièrement diminuées devant ses administrés, soit maintenu dans l’exercice de sa magistrature ». Le gouverneur propose au président de la République la révocation pure et simple du maire « en raison de la gravité des faits relevés contre ce magistrat municipal » [1] Gratien Candace interpelle alors le ministre des Colonies sur la sanction à infliger au maire de Morne-à-l’Eau, accusé de tromperie sur le poids du pain vendu. La réponse parvient sous la forme du décret pris le 5 septembre 1924 portant révocation du magistrat municipal, signé du ministre des Colonies Daladier et du président de la République Gaston Doumergue. La révocation du maire Archimède ouvre une période d’instabilité au niveau du conseil municipal entre le premier et le deuxième adjoint. Toutefois, Justin Archimède est réélu aux municipales du 6 mai 1925. Il bénéficie en plus du soutien du nouveau gouverneur, Maurice Beurnier qui se déclare dans une lettre du 25 juin 1925 prêt à collaborer avec l’assemblée municipale de Morne-à-l’Eau. Archimède est vainqueur aussi des élections cantonales de la même année en même temps que Richelieu Nelson et Jacques Gama tous les deux de Morne-à-l’Eau.
[1] Le gouverneur de la Guadeloupe et dépendances à Monsieur le ministre des Colonies, le 6 août 1924.
Franck Garin
Historien et sociologue
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